Éliminer les mauvaises herbes avec l’intelligence artificielle

Les gagnant du prix national de la catégorie Innovations technologique et technique — Vidéotron Affaires du Défi OSEntreprendre

Philippine Tinguy blogue

Et si l’intelligence artificielle pouvait faciliter le travail des agriculteurs? C’est ce à quoi travaille la startup sherbrookoise Désherbex en développant un outil technologique pour éliminer les mauvaises herbes qui empêchent les légumes racines de pousser.

« Dans les champs de panais, de radis ou d’oignons, on ne peut pas brasser la terre, explique Simon Michaud, le président et fondateur de la jeune entreprise. Dans les fermes biologiques, il faut donc désherber à la main. »

Une tâche longue et fastidieuse qui touche également les fermes traditionnelles, aux prises, depuis quelques années, avec des mauvaises herbes résistantes aux herbicides, et qui doivent être arrachées manuellement. À long terme, Désherbex souhaite devenir un vecteur de transition de l’agriculture traditionnelle vers l’agriculture biologique.

Répondre aux défis des agriculteurs

L’idée a germé à l’été 2019, alors que l’étudiant au baccalauréat en génie robotique à l’Université de Sherbrooke effectuait un stage dans des champs de carottes biologiques. « J’ai vu des gens qui désherbaient à longueur de journée, couchés sur des tables de massage tirées par un tracteur, se rappelle Simon Michaud, qui n’avait auparavant jamais foulé de terre agricole. Quand l’agriculteur m’a expliqué l’ampleur du problème, ça m’a interpellé. »

C’est dans le cadre d’un cours d’entrepreneuriat visant la création d’un produit innovant avec un potentiel de marché, à laquelle ont participé des étudiants en génie et en administration, que Désherbex est née, avec la collaboration de deux des camarades de classe de Simon Michaud, ainsi que d’un ami d’enfance.

« Nous nous sommes promenés dans une quarantaine de fermes en Estrie et nous avons constaté que le problème était partout, poursuit celui qui étudie désormais à la maîtrise. Les fermes bios, comme les traditionnelles, sont touchées par la pénurie de main-d’œuvre. »

Le désherbage étant une tâche très demandante et pénible, recruter et retenir les employés représente tout un défi. « On veut diminuer la main-d’œuvre qui se consacre spécifiquement à cette tâche-là, pour la rediriger vers d’autres tâches ayant plus de valeur pour la ferme », indique Simon Michaud.

Souvent, les agriculteurs n’ont pas le temps de traiter toutes les terres, et cela finit par entraîner des pertes de récoltes. « Nous avons rencontré un propriétaire d’environ 50 acres qui dépensait 150 000 $ en main-d’œuvre par été pour le désherbage. Ses efforts ne l’ont pas empêché de perdre 25 % de ses récoltes », se désole l’entrepreneur.

Désherbex répond donc à un certain nombre de défis auxquels les agriculteurs font face au quotidien.

Desherbex 3 personnes

Bruno Crispin, directeur Produit et Stratégie, Solutions Mobilité & IoT Affaires, Vidéotron Affaires, Nadia Proteau - (Spécialiste Marketing) Cofondatrice, Simon Michaud - Président Co-Fondateur. Crédit photo: Patric Nadeau Photographe

Défi OSEntreprendre

Cette innovation a valu à Désherbex le prix national de la catégorie Innovations technologique et technique — Vidéotron Affaires du Défi OSEntreprendre en juin dernier, ainsi que deux prix « coup de cœur » — Scientifique en chef et Ingéniosité — avec une bourse totalisant 20 000  $.

Ce parcours, d’une durée d’un peu plus de six mois, a permis à l’équipe de Désherbex d’étoffer son carnet de contacts, de recevoir de précieux conseils, mais surtout de travailler sur son modèle d’affaires. « Nous préparions deux autres concours en parallèle; la Bourse Pierre-Péladeau et le Global Social Impact Challenge à San Diego, se souvient Simon Michaud. Ça a été très bénéfique, parce qu’on a dû développer trois présentations articulées différemment selon la problématique abordée. »

Cet exercice les a amenés à se questionner sur leur vision à long terme et leur potentiel d’impact, au-delà de la technologie développée. « On a maintenant un plan de croissance couché sur papier et des objectifs clairs. »

Quant aux différentes bourses amassées, l’entreprise sherbrookoise compte en disposer comme levier pour développer ses projets de commercialisation à venir.

tracteur

Créer de nouvelles pratiques agricoles

En attendant, Désherbex investit ses efforts dans la recherche et le développement pour pouvoir continuer à tester sa technologie sur le terrain, dès le printemps prochain.

« L’un de nos défis était de passer de la théorie à la pratique, rappelle l’étudiant à la maîtrise, qui a pris une pause forcée en raison de la pandémie. On a travaillé très fort sur notre technologie, mais dans les champs, ça ne fonctionnait pas. »

« La leçon à retenir est qu’il faut développer la technologie non seulement sur le terrain, mais aussi avec les agriculteurs, pour s’assurer qu’elle répond à leurs besoins, poursuit-il. Ce que je peux dire aux entrepreneurs qui souhaitent se lancer en affaires, c’est que le terrain vaut mille heures théoriques! »

Désherbex souhaite, dans un premier temps, offrir un service de désherbage, pour ensuite migrer vers la vente de machines dès que la technologie sera validée. « On envisage même d’offrir nos services en Californie ou en Floride, l’hiver! »

L’équipe souhaite également faciliter la création de nouvelles pratiques agricoles avec sa technologie d’agriculture de précision, un domaine encore peu développé. « Grâce à l’intelligence artificielle, on pourrait développer des outils pour obtenir de meilleurs rendements et des produits de meilleure qualité », conclut Simon Michaud.

OSEntreprendre

C’est pour soutenir les initiatives de nouveaux entrepreneurs audacieux et innovants que Vidéotron Affaires continue de s’engager fièrement auprès du Défi OSEntreprendre.


21 décembre, 2022, Par Philippine de Tinguy

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